Espace « Nordique » du Somport : un slalom périlleux, hasardeux… et coûteux entre les aléas climatiques


Nous vivons une époque où, à tout le moins chez nous, le dicton « En avril ne te découvre pas d’un fil » n’a jamais été aussi peu d’actualité. Et s’ils sont peut-être un peu plus perceptibles dans la plaine ou le piémont, les effets du changement climatique n’épargnent pas notre montagne béarnaise. Témoin les difficultés auxquelles est confronté notre Espace « Nordique » (un qualificatif un rien décalé aujourd’hui) du Somport.

Un état de la situation expédié en 2 lignes dans le rapport d’orientations budgétaires de la CCHB

C’est une séance d’ordre essentiellement budgétaire qui attend nos conseillers communautaires ce 10 avril. L’un des 40 votes auxquels ils seront appelés concerne le budget annexe de l’Espace « Nordique » du Somport. Lors du débats sur les orientations budgétaires qui s’était tenu le 22 février dernier, le sujet avait été expédié en 2 lignes dans le rapport présenté aux élus : « Par ailleurs, face au manque d’enneigement qui vient grever l’activité hivernale du Somport, nous prévoyons une subvention exceptionnelle de 200 000 € pour le budget annexe ».

Un peu court comme explications pour nourrir un débat, non ? Heureusement, si l’on peut dire dans la mesure où son contenu n’est guère encourageant, l’un des rapports de ce 10 avril contient des informations beaucoup plus explicites.

Un projet de modernisation et de diversification en devenir

Le rapport rappelle tout d’abord que le bâtiment d’accueil de l’Espace du Somport, qui accueille les différents services et activités de la station, a fait l’objet d’une rénovation en 2022. L’objectif est d’en faire un site de loisirs et de découverte du patrimoine. Ouvert toute l’année, il renforcerait l’attractivité du site et permettrait de pallier le manque d’enneigement éventuel (!) en hiver. Le rapport précise que, faute d’obtention de l’autorisation administrative, ce projet de diversification des activités n’a pu être mis en place pour l’été 2023.

Victime des caprices de la météo en 2023

Le rapport de ce 10 avril fait valoir combien, en 2023, les aléas climatiques se sont ligués pour nuire au fonctionnement du site et ainsi à creuser son déficit :

  • Une période d’enneigement annuelle inférieure de 28 jours à la moyenne des 5 années précédentes (avant COVID). Soit une perte moyenne de chiffre d’affaires de 3 500 € par jour
  • Une mauvaise météo en juin et juillet qui a plombé la fréquentation

Résultat des courses : déficit lié à la crise sanitaire des années 2020 et 2021 inclus, le déficit cumulé s’établit à près de 200 000 € en 2023.

Des mesures de sauvegarde à prendre en 2024

Le rapport expose ces mesures destinées à réduire les charges de cette année :

  • Réduction de l’ouverture du site en avril, mai, juin, septembre et octobre à hauteur d’une journée par semaine
  • Fermeture du site tout le mois de novembre

Où est la cohérence ?

Probablement parce qu’il est bas-de-plafond, le blogueur a du mal à trouver une logique dans le raisonnement qui a présidé à la prise de ses mesures. Comment peut-on, en effet, proclamer l’objectif de renforcer l’attractivité du site en l’ouvrant toute l’année… et, dans le même temps, annoncer décider de réduire le temps d’ouverture, voire de fermer carrément, durant 6 mois ?

Résultat financier des courses

  • Pour la 1ère fois dans l’existence de la CCHB, la communauté de commune va devoir apporter une subvention d’équilibre au budget de l’Espace du Somport
  • Mode de calcul de cette subvention d’équilibre : elle tient compte à la fois de l’absence de neige en janvier et février 2024 (manque à gagner évalué à 100 000 € par rapport aux recette de l’année 2023) et du déficit de l’année 2023
  • Montant de cette subvention 2024 : 250 000 € (soit 50 000 € de plus que ce qui était annoncé il y a un mois et demi dans le rapport d’orientation budgétaire). Comme quoi on n’en a peut-être pas encore fini d’entendre parler de cette subvention d’équilibre et la voir dans le courant de cette année 2024 atteindre un nouveau sommet

Et maintenant ?

Il serait désobligeant de penser que les élus et techniciens en charge du dossier n’ont pas conscience de la gravité de la situation. Mais, puisqu’il existe semble-t-il un projet de modernisation et de diversification, pourquoi n’en livrent-ils pas le détail aux citoyens ? Parce qu’en l’état des choses on a quand même le sentiment d’une spirale infernale ou d’une politique qui va droit dans le mur… de neige

11 réflexions sur “Espace « Nordique » du Somport : un slalom périlleux, hasardeux… et coûteux entre les aléas climatiques

  1. Fabien

    Il existe des solutions pas forcément très onéreuses pour permettre aux vacanciers d’expérimenter des sensations de glisse si la neige vient à manquer: les pratiques à roulettes. Aucune des stations béarnaises n’a tenté le coup.
    Ce sera moins « nordique » mais peut-être plus en phase avec les possibilités climatiques, et une manière de « garder le client » sur place, voire d’attirer un public spécifique.
    Pourquoi pas une piste de type patinoire à roulettes quelque-part là-haut, ou un mini skatepark à La Pierre ou Artouste (station typée freestyle depuis longtemps).
    Pourquoi ne pas essayer sur une saison, avec un investissement qui ne représente pas grand-chose au regard de ce que coûte l’entretien et le fonctionnement des remontées, le travail de la neige etc…. 
    Fabien

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    1. Francis coursenssy

      quels seraient les moyens de déplacement de cette clientèle spécifique ? En voiture ? En bus ? Peut être en train tant que l’on y est, abitues que l’on est aux déficits ?

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  2. michelelacanette

    Il serait désobligeant de penser que les élus et techniciens en charge du dossier n’ont pas conscience de la gravité de la situation. Mais, puisqu’il existe semble-t-il un projet de modernisation et de diversification, pourquoi n’en livrent-ils pas le détail aux citoyens ? Parce qu’en l’état des choses on a quand même le sentiment d’une spirale infernale ou d’une politique qui va droit dans le mur… de neige

    L’ erreur commise a été la rénovation de 2022 en tant que station de ski de fond. Nos amis Basques du Syndicat de Soule ont très bien compris le problème et ont fermé l’ activité ski de fond qui consommait les revenus financiers de la location des chalets d’ Iraty. Entêtement qui aurait pu hypothéquer l’ avenir du maintient des chalets. Le choix a dû sûrement être difficile, alors que cette station bénéficiait d’ un cadre et d’ un enneigement exceptionnels, mais choix réaliste, car à l’ avenir les stations de basse altitude sont appelées à disparaître. Pour le Somport en 2022 il aurait fallu faire le même choix et la transformer en station d’ activité estivale, mais se pose le problème que cette station a été construite illégalement en plein Parc National à une époque où les Maires de la Vallée avaient fait le forcing et mis tout le monde devant le fait accompli. (Coutume Aspoise dans de nombreux domaines). Quarante ans après on en revient au point de départ. Faut’il la maintenir ou la condamner? Peut être que le réalisme de certains, lors de la réunion du 10 Avril, apportera un début de réponse.

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    1. Francis coursenssy

      d’aucuns vont dire que je me répète, maïs enfin n’ y a t il pas, un certain parallélisme entré ce qu’il se passe au Somport et cette ligne de train Oloron Bedous et puis Canfranc ? Une ligne verte entre Oloron Bedous et Canfranc aurait été autrement plus Utile et bénéficie use pour tous, pèlerins, cyclistes marcheurs, trails, autrement plus sécurisé que cette national chemin de chèvres, avec des points de restauration, animations et non pas une gabegie de plus à au moins 700 millions d’euros quand on sait l’état de délabrement de bien de coins de la ville sans parler de son hôpital,etc

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  3. Julien Brunel

    Le bloggeur décrit un classique des collectivités qui ne prennent pas réellement en compte l’adaptation aux conséquences du dérèglement climatique. En particulier, les stations du 64 qui sont face à cette question climatique, comme « le lapin pris dans les phares de la voiture ».

    Certes, il faut impérativement reconnaitre la réelle volonté de bien faire. Ne pas abandonner les sites et le territoire. Apprendre à travailler sans la neige, ce qui permet de travailler toute l’année, entrainant une sortie de la précarité des emplois et activités saisonnières et permettant de pérenniser l’installation de familles sur le territoire avec un impact positif sur l’offre de santé, le maintien des classes et l’activité économique et sociale en général.

    Mais la question du dérèglement climatique n’est pas prise au sérieux. Les projets sont encore pensés comme les projets du passé. Dans la conception, programmation et les arbitrages, l’adaptation aux conséquences du dérèglement climatique est traitée à minima et à la marge, alors qu’elle devrait être absolument centrale.

    La conséquence de ce manque de pragmatisme et de vision politique, est la réalisation de projets couteux, poussifs, mal adaptés et dont le pilotage budgétaire est fait « à vue ».

    En particulier en zone de montagne, car, selon Météo France, « Les montagnes se réchauffent deux fois plus vite que les autres écosystèmes : dans les Alpes et les Pyrénées françaises, la température a augmenté de plus deux degrés au cours du XXe siècle, contre 1,4 degré dans le reste de la France« .

    https://www.vie-publique.fr/eclairage/291256-la-montagne-face-au-changement-climatique-quelles-voies-dadaptation#:~:text=La%20hausse%20des%20temp%C3%A9ratures%20a,les%20activit%C3%A9s%20humaines%20s'acc%C3%A9l%C3%A8re.

    Cela veut dire que les collectivités de montagne devraient porter des projets d’adaptation aux conséquences du dérèglement climatique, deux fois plus ambitieux et pas deux fois moins, comme c’est le cas ici.

    Que le projet du Somport soit pensé pour « pallier le manque d’enneigement éventuel en hiver » démontre le fort déni climatique de ses promoteurs. La réalité scientifique indiscutable, c’est que dans les années à venir, le manque de neige en hiver ne sera pas « éventuel », il sera certain et permanent. C’est à cette réalité que doivent se préparer le Somport et les autres stations du Béarn.

    Pire ! Quand le rapport de la CCHB du 10 avril écrit à propos du projet du Somport, que « les aléas climatiques se sont ligués pour nuire au fonctionnement du site et ainsi à creuser son déficit« , comme si c’était « la faute à pas de chance », il semble oublier qu’il n’y rien de fortuit ou d’exceptionnel dans ce qui s’est passé. Car, selon le GIEC, « l’augmentation de la fréquence et de l’intensité des phénomènes climatiques, conséquence du dérèglement climatique, va brutalement et durablement impacter les activités économiques« . Ne pas en avoir tenu compte dans la programmation du projet est une erreur qui coûte effectivement très cher à la collectivité et propose aux élus une explication inquiétante de naïveté.

    Le dérèglement climatique ne fait pas de politique, il ne négocie pas. C’est lui qui nous impose le rythme et la mesure de l’adaptation, pas l’inverse.

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    1. Ossau

      Mon Dieu le GIEC! avant il parlait de réchauffement et maintenant de dérèglement n’étant plus tellement sût de ses affirmations. Oui il faut s’adapter! Tenez la vallée d’Ossau glaciaire il y a 10.000 ans soit une seconde dans l’histoire de la planete Terre a su s’adapter. C’est maintenant une verte vallée. A qui sait attendre :) … Je préconise pour le site du Somport de le geler et d’attendre la fin du réchauffement. Regardez les ours « en voie de disparition » avec cet hiver doux les naissances ont été multiples. Par contre pitié! pas de skate boarders! 1 heure de route d’oloron alors qu’on a les lacets du Biscondeau et la rue labarraque , c’est pas très écologique.. un simple remonte pente récupéré et réinstallé :)

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      1. michelelacanette

        Que du bon sens. La nature sait s’ adapter, sans avoir besoin des humains. Bientôt en attendant le retour de la future glaciation, elle fera pousser des bananiers, des manguiers et toute sorte de fruits exotiques au Somport, de plus en label rouge sans traitement de synthèse. Peut être que les singes de Gibraltar seront condamnés aussi à remonter au Somport pour chercher un peu de fraîcheur salutaire sous les cocotiers. Ils pourront se baigner dans le lagon du lac d’ Anglus ……

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      2. Fabien

        Quand on a loué pour une semaine et qu’on a des conditions d’enneigement ne permettant pas de skier, les roulettes peuvent offrir une source de distraction et d’activité sportive intéressante. Ce n’est plus une pratique marginale de quelques têtes brûlées, c’est entré dans les moeurs hein… Et ça reste plutôt écologique comme pratique ainsi que comme moyen de déplacement en ville!

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  4. manautgeorges

    On a plaisir de pouvoir obtenir de telles informations pour briser la discrétion de nos décideurs politiques. Ainsi, le fonctionnement de cette station du Somport génère une perte de chiffre d’affaire de 3500 € par jour. c’est à peine un peu moins que le déficit d’exploitation du tronçon ferré Oloron Bedous avec 3534 € par jour. Où la différence s’accentue est que déficit d’exploitation journalier du train se perpétue pendant les 365 jours de l’année. Il se cogite pour dissimuler ce fiasco est d’en créer un plus gros en prolongeant la voie ferrée jusqu’à Canfranc.  

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  5. infod61fc7b84e5

    Notre « cher » Président de la Région a déjà la solution. Rouvrir la ligne ferroviaire Pau – Canfranc pour envoyer les skieurs toulousains et bordelais aux stations du Somport, d’Astun et de Candanchu. Sauf qu’il oublie de nous dire que les futurs horaires des trains issus des études de convergence sont incompatibles avec les horaires des trains Toulouse – Pau et Bordeaux – Pau, ceci même en modifiant les horaires de ces derniers. Les Toulousains continueront donc à prendre leur voiture pour se rendre à Peyragudes ou ailleurs, les Bordelais continueront donc à prendre leur voiture pour se rendre à Hautacam ou ailleurs.

    Pour vous en convaincre, voici l’analyse qu’a faite le CROC sur les horaires de ces trains pour se rendre à la station du Somport :

    https://croc-aspe.com/?page_id=6150

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  6. Beaucoup de personnes s’offusquent de la perte de 3500 € par jour du chiffre d’affaire du fonctionnement de la station du Somport, mais ce sont les mêmes personnes qui ont soutenu la réouverture du tronçon férré Oloron Bedous qui génère un déficit journalier de 3554 € durant les 365 jours de l’année. Et nous avons eu droit à cette info grâce au rapport des magistrats de la Cour des comptes. Est ce que nous oublirons ce premier fiasco si l’on en conçoit un deuxième bien plus important pour rallier Canfranc ?

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