Magazine municipal : le maire d’Oloron répond dans une interview aux questions posées par… Hervé Lucbéreilh


Inf’Oloron n°4 vient de sortir. Sur la forme, rien à dire…. si ce n’est du bien : c’est clair, rythmé, informatif. Sur le fond, Inf’Oloron n’est pas encore Luc’Info, mais cela ne saurait tarder si le maire se met à accorder des interviews (pages 8 et 9) à ce magazine dont il décide lui-même du sommaire. C’est un peu comme si Serge Dassault se faisait interviewer par le Figaro. Essayons de démêler le vrai du faux dans cet « entretien-vérité » de notre premier magistrat.

ITV Lucbéreilh P.1Le titre de l’article (cf photo) est à lui seul tout un programme : « Notre ville est comme une entreprise, elle doit gagner de l’argent ». Pour gagner de l’argent, une entreprise table sur ses clients. Qui sont les clients de la ville ? Ses administrés, dont une partie sont aussi ses financeurs principaux via les impôts. Pour gagner de l’argent, la ville tape donc dans la poche de ces administrés contribuables (au bas mot, augmentation de 15 à 20% de la taxe d’habitation l’an dernier).

Le chapeau qui introduit l’interview n’est pas mal non plus. Dans un style très grand-reporter, le présumé interviewer, qui ne se présente pas, nous y raconte que le maire lui a accordé rendez-vous afin d’exposer ses intentions pour l’année 2016. L’interviewer mystère fait monter le suspense en nous expliquant qu’il a posé des questions inattendues auxquelles le maire a répondu « sans détours ». L’interviewer inconnu, un rien fayot, achève sa présentation en nous garantissant que nous avons sous les yeux une interview « sans langue de bois d’un homme qui prend ses responsabilités pour le bien commun ». Dans le genre « entretien sans concession », on a connu mieux. Et si tout bonnement le maire d’Oloron avait dans cette interview répondu aux questions « sans détours » d’un certain… Hervé Lucbéreilh ?

Venons-en maintenant aux réponses données par le maire. En essayant de démêler le vrai du faux et de détecter les oublis et autres trous de mémoire auxquels ce genre d’exercice se prête.

VRAI mais TROU de MÉMOIREVRAI lorsque le maire fustige « l’endettement continu de la ville (qui) a été un moyen politique, apparemment indolore, de gouverner la ville en disant oui à tout ». TROU de MÉMOIRE quand il oublie que sa gestion 2001-2008 entre pour une part non négligeable dans cet endettement.

FAUX quand le maire affirme que la dette a baissé « de 1,8 millions d’euros en un an ». Il suffit pour s’en convaincre de se référer aux budgets de la ville. Cette baisse de la dette, déjà très honorable, a été obtenue en deux ans (2014 et 2015) et non en une seule année.

FAUX lorsque le maire explique que cette baisse a été obtenue « en rationalisant les dépenses ». Il suffit là encore de regarder le budget de la commune. Les dépenses de fonctionnement prévues en 2015 étaient supérieures de 600 000 € à celles prévues en 2014. Prétendre rationaliser les dépenses…. en les augmentant, c’est prétendre faire des économies…. en dépensant davantage. Il y a là une contradiction qui n’échappera à personne.

VRAI quand le maire considère que, faute d’autres ressources, « il a donc fallu inventer le concept de la ville-entreprise où nous cherchons tous les moyens de faire rentrer de l’argent pour faire bouillir la marmite ». Voilà une bonne idée ! Reste maintenant à préciser les moyens que la ville entend mettre en œuvre pour la mettre en pratique ainsi que les bénéfices qu’elle en escompte.

VRAI et FAUX – Le maire dit VRAI quand il assure que sous son mandat précédent la ville s’est modernisée et est sortie de son endormissement. FAUX quand, pour témoigner du nouveau dynamisme qu’il insuffle à Oloron depuis 2014, il appelle à la rescousse des projets (rénovation de l’Hôpital, réaménagement du Leclerc, création de résidences pour personnes âgées, projets immobiliers divers et variés) dans lesquels la ville ne prend aucune part. Parce qu’ils émanent tous soit de particuliers, soit d’autres administrations.

TROU de MÉMOIRE lorsque le maire jure qu’il est épargné par la « politique politicienne ». Il oublie là ses navigations à la godille entre divers partis politiques en vue d’obtenir une investiture aux élections départementales et régionales. Sur un plan plus local, il oublie quelques règlements de comptes avec des associations jugées par lui politiquement incorrectes. Il oublie encore le niveau auquel il situe parfois le débat dans ses répliques à son opposition lors des conseils municipaux.

En conclusion, je citerai Jules Renard qui écrivait dans son Journal : « Le meilleur interviewer est celui qui dit que j’ai un oeil d’aigle et une crinière de lion ». À l’évidence, le maire d’Oloron a trouvé son meilleur interviewer : Hervé Lucbéreilh.