La rue Louis-Barthou morte pour le commerce ? L’expérience vécue par un porteur de projet (1ère partie)


Bertrand Liocourt a le projet de créer un café-librairie. Il envisageait de l’implanter en centre-ville, rue Louis-Barthou. Les difficultés qu’il a rencontrées l’ont contraint à renoncer, non pas à son projet, mais à une installation dans cette rue. Il nous fait part ici de son expérience qu’Oloronblog publiera en deux parties. Aujourd’hui, 1ère partie exposant l’état des lieux et les handicaps de ce qui fut jusqu’à il y a quelques lustres l’artère commerçante de notre ville. Demain, dans la seconde partie, Bertrand Liocourt s’attachera à formuler quelques propositions qui devraient permettre de nourrir le débat. (les titres et sous-titres sont du blogueur)

I –  Rue Louis-Barthou : état des lieux et handicaps

Les Oloronais le savent, la rue Barthou ne va pas bien ; 500 mètres de long, quelques commerces et surtout pas moins de 34 locaux commerciaux vides ! Le plus petit proposant une vingtaine de m² jusqu’à 220 pour le plus grand. Il y a de quoi faire donc. Mais alors pourquoi cet abandon, qui donne à cette rue qui a connu des jours de gloire, un aspect désertifié et vieillissant ?

Après avoir tenté de m’y installer, mon constat est sévère, cette rue est définitivement morte pour le commerce. Pourquoi ?

Comme bien souvent, il n’existe pas un seul facteur responsable ; non il en a fallu plusieurs pour arriver à cette situation. Tout d’abord son accès qui en voiture est unique et suppose de trouver une place pour se garer pas trop loin de sa destination, sinon il faut refaire 1.5 kilomètre pour y revenir (via le jardin public). Les places étant prises par le stationnement résidentiel, parfois par les commerçants eux-mêmes… Ou alors il faut s’y rendre à pied par la passerelle en se garant au jardin public ou devant la sous-préfecture. Mais cette habitude n’est guère prise pour l’instant…

L’état des lieux

Que trouve t-on rue Barthou actuellement comme commerces ?

  • Un opérateur téléphonique
  • Une agence (très récente) immobilière
  • Un tatoueur
  • Deux photographes
  • Deux bijoutiers/horlogers
  • Deux enseignes de produits de beauté
  • Sept magasins de vêtements
  • Deux boucheries-charcuteries
  • Quatre salons de coiffure
  • Une boutique de produits artisanaux
  • Un local associatif
  • Un opticien
  • Deux banques
  • Une boutique dédiée aux arts de la table
  • Un audioprothésiste
  • Quelques libéraux

Ont fermé récemment un magasin de vêtements, une boutique de cadeaux, une petite librairie, et un bar/restaurant lounge, et deux activités (+ la mienne) ont préféré chercher ailleurs… Honnêtement, quand on lit cette liste, on s’aperçoit qu’il y a de l’activité tout de même ; mais la foultitude de vitrines vides et fermées donne un aspect morbide qui gomme cette réalité. Dur pour une artère qui d’un avis général voit des touristes y circuler. Sans pouvoir se poser quelque part… J’ai fait un décompte rapide : 34 locaux sont vides ! A louer, parfois à vendre, et pour le reste tout simplement abandonnés.

Les handicaps

Mais pourquoi des vitrines vides ? C’est une bonne question à laquelle jusqu’ici je n’avais que des réponses partielles. J’en ai maintenant des définitives.

  • Outre les problèmes de parking auxquels une orientation plus touristique de la rue pourrait répondre (boutiques d’art, artisans, petit café animé…) ; la difficulté principale vient des locaux eux-mêmes. Les loyers sont souvent très élevés, du moins beaucoup trop pour une rue de ce type (certains propriétaires demandent parfois des sommes entre 1000 et 2000 euros !). La CCI de Pau me faisait remarquer récemment que le niveau des locations demandées est égal à celui de Pau…
  • Mais si on peut malgré tout accepter un loyer surévalué, il faut ajouter à l’investissement de travaux assez lourds pour la grande majorité de ces locaux. Electricité, sécurité incendie, accessibilité handicapés, isolation, aménagement. Bien sûr sans que les propriétaires acceptent d’y mettre un seul euro. A la limite ils accepteront un ou deux mois de loyers gratuits le temps des travaux.
  • Les deux photos qui suivent donnent l’étendue des dégâts : ce local est à louer depuis au moins trois ans, il en est demandé en bataillant un peu 800 euros. Je vous laisse juger vous-même. Si la façade avant semble correcte, l’arrière, lui, donne une idée de ce que l’on peut trouver à l’intérieur… A commencer par des pigeons, parfois vivants, parfois non… Une honte.

commerces-rue-louis-barthou

A propos des normes en vigueur, elles deviennent délirantes en exigence. Côté Gave, la plupart de ces anciens commerces ont un niveau inférieur. Les toilettes y sont souvent placées, je pense que par le passé, tout devait partir au Gave directement… Aujourd’hui, pour qu’une personne handicapée puisse se rendre aux toilettes, il faut donc en recréer au niveau de la rue. Je n’ai pas visité un local pour lequel c’était déjà fait… Or, à partir du moment où il y a une déclaration de travaux (pour une création d’activité par exemple), la loi Handicap doit être appliquée, sous peine de très lourdes amendes et d’une fermeture administrative. Quant aux normes de sécurité pour les locaux ayant plus de 100 m², il y a exigence de 2 sorties minimum ; mais comme il ne peut y en avoir à l’arrière sans tomber dans le Gave…

Donc : stationnement difficile (à quand des « vélibs » à Oloron ?), loyers ou prix de vente surévalués, normes contraignantes, et locaux dévastés pour la plupart. Mais le tableau n’est pas complet.

Car dans la rue Barthou, il y a des habitants. Ceux du local que je voulais louer sont partis en plein délire fantasmagorique, imaginant déjà des jeunes venant écouter de la musique, ce qui forcément gâcheraient leur petit confort dans cette rue qui préfigure déjà le calme des cimetières… C’est ainsi que je me suis retrouvé « convoqué » pour venir m’expliquer des nuisances à venir. Je crois que c’est là que j’ai définitivement décidé de stopper l’implantation de mon projet dans cette rue…

… à suivre

11 réflexions sur “La rue Louis-Barthou morte pour le commerce ? L’expérience vécue par un porteur de projet (1ère partie)

  1. eugene

    ce problème est particulièrement critique à oloron, mais il n’est pas specifique. en raison du surdeveloppement du grand commerce à la peripherie, le petit commerce se meurt en centre ville.et on a failli avoir un maxi lidl supplementaire!

    un recent reportage au 20H de france 2 montrait que ce probleme etait generique dans les villes moyennes. de plus oloron n’a pas de centre ville, des boutiques disperséee partout ne permettent pas l’effet centre commercial qui pourrait attirer le chaland.l’accessibilité est également un probleme et ce n’est pas un velib qui ramenera les clients. une anecdote sur l’etat de l’immobilier : un horloger est en location, le proprietaire n’entretient pas son bien, le plafond de l’atelier lui est tombé sur la tete! en raison du classement et des normes, les travaux sont très couteux. Et le prix indiqué par le porteur de projet est hors marché. Donc nous sommes dans un cercle vicieux. Comment en sortir? deux hypothèses : 1) essayer d’en refaire une rue commerçante attractive. cela semble difficile pour les raisons indiquées par le porteur de projet et l’absence de projet d’urbanisme/aménagement dans la ville. 2) en refaire un quartier de vie avec des logements et quelques petits commerces de proximité. il faudrait un projet global avec reprise en main du patrimoine immobiler pour notamment avoir des prix raisonnables, ce qui signifie que les propriétaires acceptent de realiser leur moins value. Car ce n’est pas l’etablissement public foncier qui regelera le probleme, il genere une augmentation des couts de l’immobilier. en faire une rue pietonne avec des commerces pour touristes?, mais le marché n’y est pas car la saison est courte ( sous developpement local du tourisme, mais c’est un autre probleme) et peu de bobos à oloron alors qu’ils sont les clients de ce type de secteur ailleurs. Reste le probleme de l’accessibilité/du transport. La navette vide ne reglera pas le problème.Pourtant il ya un parking gratuit à la mediatheque. Cette rue cristallise l’absence de projet urbain et de developpement à oloron, A quand un vrai projet pour la ville!

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  2. C’est vrai Eugène, vous avez raison, cela ne concerne pas qu’Oloron, de nombreuses villes de moins de 100 000 habitants sont touchées par cette désertification commerciale. Mais ajoutons une petite remarque sociologique : les petits commerces et artisanats de centre ville sont susceptibles d’être souvent repris par des petits entrepreneurs dont c’est souvent la première expérience. SOuvent des salariés qui ont envie de franchir le cap de l’autonomie animés par une passion, une idée… Se sont aussi souvent des demandeurs d’emplois qui tentent de créer leurs propres moyens de subsistance. Malgré des loyers souvent bien trop élevés, ce sont ces locaux qui restent accessible pour ces deux populations. Le problème n’est donc pas qu’économique, il est également social. Et là où les élus devraient ouvrir les yeux, c’est que ces entrepreneurs sont généralement des individus très motivés, capable de porter des projets dans des conditions hostiles à l’entreprenariat. Une simple équation me vient du coup : attrait (à développer) touristique d’Oloron et du Haut-Béarn + entrepreneurs très motivés = développement territorial.

    Mais franchement, ici, pour en revenir à Oloron, on ne peut pas dire que les élus de la Municipalité ni ceux de la Com Com (et que son Président n’en prenne ombrage, j’ai apprécié sa sollicitude) possède des services en capacité d’aider et accompagner les entrepreneurs. Ici, on s’aide les uns les autres, on peut aussi profiter de la petite structure EPI créée par Gérard Portet, mais autrement niet, nada, que dalle, yapa… De fait, les commerces qui ouvrent, le font dans des locaux neufs et aux normes, mais que je juge personnellement sans identité aucune. Et bien sûr, ce sont souvent des enseignes nationales. Voilà l’avenir d’Oloron ? Une grande rocade accompagnée des lumières d’enseignes de tour de ville comme on en voit partout ? De fait, l’atout touristique finira par disparaître devant cette uniformité, et les situations sociales seront désespérées.

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  3. Serge

    Louis Barthou, rue piétonne? Pourquoi ne pas essayer.. commencer par le week-end ou l’été, il sera toujours temps de faire un bilan…
    Depuis 25 ans que je suis oloronais, je n’ai jamais vu autant d’épicerie s’ouvrir… le Directeur de Leclerc reconnaissait que la tendance en france s’inversait et que les gens revenaient vers des petits magasins de proximités (l’humain, le bon, le beau, le solide, le local… le bio!!)
    Bien entendu, c’est long parce que nos élus réfléchissent avec quelques décennies de retard .. reste, que toutes les initiatives innovantes se font sans aide.. souvent dans l’indifférence, si ce n’est accompagné de moquerie..
    Le tourisme, c’était le thème du premier mandat de MR Lucbéreilh qui nous avait promis de faire d’Oloron sainte marie le nouveau Sarlat… entre temps il est revenu à l’aire industriel…

    café associatif, magasin vrac, atelier de réparation vélo… associations et autres projets qui cherchent un domicile
    plan de circulation vélo proposé par Oloron en transition, etc…
    Oui, il est temps de bâtir un projet de ville! Une initiative citoyenne… c’est une idée qui mûrit…

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  4. rd918

    même souvent les galeries marchandes souffrent avec un turn over fréquent des enseignes…
    je connais quelqu’un qui avait une petite boutique rue louis barthou…mais à Pau. Elle a arrêtè pour faire la même chose mais par internet de chez elle . Bien moins de charges…

    hélas! sacré challenge avec les habitudes d’achat qui changent

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  5. fabien

    Cela fait une douzaine d’années que le virage « tout en périphérie » a été pris à Oloron. Le quartier Sainte-Marie résiste plutôt bien, ce qui me paraît logique puisqu’il a une configuration qui se prête mieux à la déambulation, avec le parvis de la cathédrale comme point de convergence et de convivialité… Et la proximité voire l’inclusion/absorption dans le temps des grandes enseignes du boulevard des Pyrénées (et ses contre-allées avec petits commerces) dans une zone « bâtarde » de centre-ville prolongé.. qui remplit bien sa fonction marchande mais a l’aspect d’un centre-commercial de sortie de ville…
    Je ne vois pas quelle chance il reste à la rue Barthou de redevenir une artère attractive commercialement. N’est-il pas un peu tard pour vouloir inverser la tendance maintenant que la morphologie de la ville a été modifiée?
    Je la rêverais totalement piétonne avec des restos et des bistrots tout le long mais cela me semble bien lointain…
    Dans la rue St-Grat, pas très loin de Music’Oloron, il serait bien ce projet de café-librairie non?, ça créerait une émulation…

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  6. La rêver piètonne ? Oui. Mais pour y trouver de quoi déguster quelque chose, ça ne sera guère possible justement… S’installer près de Music’ Oloron ? Oui, j’y ai pensé. Faut-il encore y trouver un local approprié. MAis je crois savoir qu’il a eu également de sérieux déboires avec le voisinage. La tolérance recule un peu partout de nos jours…

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    1. rd918

      Il faut bien voir aussi que certains excès sont pénibles! voir le quartier du triangle à pau ou la rue des orphelines. Quelques individus « un peu trop festifs » suffisent à saquer tout effort d’animation

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      1. Sérieux débat que celui-là. Faut-il interdire toute animation sachant qu’il y aura TOUJOURS des individus qui feront du bruit au passage. Nous avons tous été jeune, non ?…

        Faut-il repousser ces espaces loin des centres-villes comme c’était le cas avant, dans les années 80, avec son lot de jeunes tués sur la route en rentrant trop tard, trop fatigué, trop alcoolisé ?

        Ou faut-il donner un coup de main aux locataires et propriétaires pour gérer au mieux les quelques nuisances ? Une aide au double vitrage acoustique par exemple ? COncernant Oloron, Music Oloron n’existait pas avant ; mais pour le Triangle, les espaces festifs existent depuis longtemps tout de même. Quand on vient habiter dans ce genre de quartier, ne faut-il pas apporter un peu de tolérance ? Ou aller habiter ailleurs… J’ai vécu un moment en ville nouvelle dans les Yvelines. Un seul bar toléré le soir, sinon rien permettant aux habitants d’aller prendre un verre et partager du lien social. Je ne revivrais jamais ! Quelle horreur.

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  7. rd918

    je suis d’accord ayant habité au quartier latin il y a bien longtemps 🙂 et donc on savait que c’était animé jusqu’à pas d’heure mais c’était bon enfant ! fanfare des beaux arts que l’on pouvait calmer en balançant de l’eau froide quand les limites de l’acoustique étaient dépassées , il y avait pas le mélange explosif coke alcool shit. Vous savez bien que cela dépasse le côté festif maintenant avec violences à la clef..on en n’est plus au côté clodo litron de villageoise. 🙂

    je vous dis ça ne sachant pas exactement quelle serait votre activité donc en dehors de toute attaque perso. De toute façon je n’habite pas oloron…:)

    mais il faut trouver bien sûr une solution pour réanimer tout ça…

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  8. fabien

    Concernant Music’Oloron, je peux vous dire qu’avec le « Basco-Béarnais » ( longtemps le siège du handball-club) reconverti depuis en « Petit Sucrier », il y a eu du bruit dans cette rue tous les vendredis soirs pendant des années bien avant la transformation de Music’ en café-concert, donc pas de « nouvelles » nuisances à ce niveau-là, mais presque une tradition (avec parfois klaxons à 4h du matin, bagarre, etc…). Rien de neuf sous les étoiles. A Bertrand : l’ancienne épicerie est vacante, à vendre même je crois…

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